g joudL'explosion d'une locomotive à vapeur à Argis, le 2 Août 1935.

Une conférence de Monsieur Gérard JOUD, le mercredi 18 novembre 2015

Plus de 80 ans après la catastrophe ferroviaire survenue dans la nuit du 1er au 2 août 1935, à 0 h 15, sur la ligne Bellegarde-Ambérieu, M. Gérard Joud, nous propose de revenir sur cette tragédie. En la circonstance, cet évènement a été marqué par l’explosion de la chaudière de la locomotive à vapeur 141 C 623 qui tractait alors l’express Saint-Gervais-Paris, entre les gares de Tenay-Hauteville et Saint-Rambert-en-Bugey. Mais aussi, par la mort des deux personnes affectées à sa conduite.

La prise en charge de la traction de ce train par le collectif du dépôt d’Ambérieu, devait s’exercer sur le seul parcours Bellegarde-Ambérieu. Celui-ci peut schématiquement se caractériser par trois tronçons. Le premier, de Bellegarde à Culoz, se particularise par une descente. Il est suivi d’une rampe qui conduit à Virieu-le-Grand, qui emprunte ensuite la cluse des Hôpitaux, jusqu’en amont de la gare de Tenay. De cette inflexion de déclivité, il retrouve une pente descendante, le long de l’Albarine, jusqu’à la gare de Culoz.

L’équipe affectée à la conduite de cette locomotive était composée d’Aimé Doumenc, mécanicien de route, et de Joseph Christin, chauffeur de route. Tous deux avaient acquis une longue expérience dans leur fonction. Mais M. Joud précise que sa constitution n’était pas celle habituellement affectée à la conduite de cette locomotive. M. Christin remplaçait en effet le chauffeur attitré, dont l’épouse était souffrante. Ce qui, souligne M. Joud, a dû quelque peu nuire à une bonne efficacité du duo. Il renchérit toutefois sur ce point en faisant état d’éléments relevés par l’enquête, mettant en lumière une certaine mésentente qui devait régner entre les deux membres de l’équipe.

Autre fait souligné d’emblée par le conférencier : la machine allait devoir « travailler » au maximum de ses capacités de traction, en l’occurrence 635 tonnes, notamment, on l’aura vite compris, dans la rampe de la Burbanche.

Après cette présentation de l’équipe, de la machine et de la ligne sur laquelle allait se déplacer l’express, M. Joud reprend les différents éléments qui ont caractérisé sa progression. Faute d’avoir pu analyser le « mouchard » de la locomotive, détruit lors de l’explosion, les enquêteurs devront reconstituer sa marche selon les horaires de passage dans les différentes gares.

Parti à 23 h 10 de Bellegarde avec 5 mn de retard (pourquoi ?), l’express n’a aucunement « repris » du temps à Culoz, 24 mn plus tard, fait plutôt anormal. Pire, il ne fait ensuite qu’en perdre davantage dès que les premières rampes se présentent. Pour permettre de comprendre les évènements qui ont dû ensuite se succéder, le conférencier aborde ensuite des aspects plus techniques concernant la conception de la locomotive à vapeur. Il montre ainsi ce qui a pu se produire par insuffisance d’eau dans la chaudière, provoquant la fonte successive des trois fusibles installés sur le ciel de foyer en cuivre. Ce qui a dû alerter le duo de conduite, mais n’a pas entraîné, semble-t-il, de saines décisions, même palliatives en cas de problème matériel, notamment de la part de son mécanicien.

Et, presque paradoxalement, c’est dans la descente sur Ambérieu, que le déplacement subit de l’eau dans la chaudière a dû provoquer l’explosion. Celle-ci, d’un poids de 35 tonnes, fut arrachée de son châssis porteur, projetée une première fois à 83 m, avant de terminer sa course à 156 m du lieu de l’explosion, après avoir « rebondie » deux autres fois. Le châssis de la locomotive et le train, lancés à 90 km/h, fort heureusement restés sur les rails, s’arrêteront quelques centaines de mètres plus loin, le circuit de freinage, en l’absence d’air, ayant bien rempli sa fonction. Seul témoignage qui a pu être donné aux enquêteurs, celui du chef de train, qui, à un moment, dans une courbe de la voie, a pu observer que la chaudière était portée au rouge.

L’enquête diligentée à la suite par la Compagnie Paris-Lyon-Marseille, n’a, semble-t-il, jamais fait l’objet de conclusions communiquées hors de l’entreprise. Les deux victimes furent citées à l’ordre de la Compagnie.